Culture(s) et tatouages : Needles tattoo à Virginal à fêté ses 6 ans

Certains l’ignorent peut-être mais, près de la poste de Virginal, se trouve un salon de tatouage. Un shop privé (sur rendez-vous uniquement), dans lequel Laurent Debrue vit de sa passion. Phénomène culturel et de société, le tatouage fait de plus en plus d’adeptes. À l’occasion des 6 ans du shop, l’équipe du Petit Tram est partie à sa rencontre. Métier, passion, démarche et créations artistiques. Découvrons ensemble l’envers de cet univers.

ÉVOLUTION ET PERCEPTION DU TATOUAGE

Étymologiquement, le mot vient du tahitien «tatau», qui signifie « marquer, dessiner ». Sa pratique ancestrale remonterait à plusieurs millénaires avant J-C. En plus de l’évolution des techniques de tatouage, celui-ci a connu de nombreuses interprétations et perceptions à travers les différents groupes, époques et régions du monde. Un rite de passage qui marque sur la peau les étapes importantes de la vie dans certaines cultures, une fonction thérapeutique dans les traditions berbères, une pratique réappropriée par les marins, un symbole païen, un attribut du milieu carcéral,… jusqu’à devenir un élément de la culture populaire contemporaine.

DES PRÉJUGÉS QUI COLLENT À LA PEAU

Derrière l’image, souvent péjorative, du tatouage se cache un message propre à chacun : moyen d’expression, signe identitaire, revendication de statut, phénomène de mode, élément artistique ou esthétique,… Libre à chacun d’en avoir son interprétation. Aujourd’hui, le tatouage touche l’ensemble de la population, toutes conditions sociales et genres confondus. On ne peut plus parler d’un « profil » particulier. Pour vous donner des chiffres, en 2017, une étude recensait plus de 1200 tatoueurs enregistrés et environ 500 000 personnes à se faire tatouer chaque année en Belgique (Source : SPF Santé publique). Et ce nombre a encore augmenté depuis.

UNE PRATIQUE EN QUESTION

« Le tatouage est-il un art ? » ; « Le tatouage fait partie intégrante de la culture populaire contemporaine et n’est plus exclusif à une culture underground majoritairement » (2015, Artsper Magazine) ; « il relèverait, aujourd’hui, plus du personnel que de l’appartenance sociale » (2021, RTBF). Pour Laurent Debrue, tatoueur à Virginal, « le tatouage est pratiquement devenu un accessoire de mode. Ma clientèle est constituée de 65-75% de femmes. La tranche d’âge varie de 18 à 50 ans. La personne la plus âgée que j’ai tatouée avait 72 ans. Mais il y a de plus en plus de jeunes. Certains ont à peine 16 ans par exemple. Dans ce cas-là, j’accepte de les tatouer uniquement avec l’autorisation et la présence des parents et en signant une décharge. »

RENCONTRE AVEC LAURENT DEBRUE, TATOUEUR VIRGINALOIS

Laurent habite Virginal depuis 2016. Après un Master en sciences-économiques à l’ULB, il a été commercial dans l’automobile pendant une petite dizaine d’années. Il n’était cependant plus épanoui, tant pendant ses études qu’après. Bien qu’étant dans une situation financière confortable, un jour, c’en fut trop pour lui.

CHANGEMENT DE VIE

« J’ai contacté la personne qui me tatouait à l’époque. Je savais qu’elle n’avait plus de shop à ce moment et qu’elle en avait marre de bosser depuis chez elle. Je lui ai demandé si ça l’intéresserait de me former pour qu’on ouvre un shop ensemble » explique Laurent.

Chose promise, chose due : «West Brussels Tattoo», leur premier shop à Anderlecht, a ouvert ses portes en 2014. Après 3 ans d’activités, le shop a été transféré à Dilbeek, jusqu’en 2020. En parallèle, en 2016, Laurent a ouvert son shop privé dans sa maison à Virginal.

Pour lui, tatouer et se lancer dans un projet artistique, était un réel besoin. Ce qui l’a aidé dans ce processus, c’est qu’il savait déjà dessiner. Un atout considérable et qui apporte une dimension supplémentaire et un autre regard pour ses créations artistiques.

Concrètement, même si la formation dure une dizaine de jours, il a fallu 6 mois pour mettre les choses sur pied : obtenir la formation hygiène, gérer l’administratif pour lancer la société, l’ouverture du shop,… « Toutes des choses qu’il faut faire pour débuter et qui peuvent paraitre désagréables, mais qui ne l’ont pas été finalement. Je me souviens d’avoir une motivation comme je n’en avais jamais eue ! C’était extraordinaire, j’avais 35 ans, je changeais de vie. Ma femme m’a soutenu à 100%. J’ai eu la chance d’être accompagné des bonnes personnes, au bon moment. Par contre, il n’y a pas de secret, même si tu as quelqu’un à tes côtés pour t’aider, te mettre le pied à l’étrier, te donner des conseils, ce n’est que seul que tu pourras progresser réellement. C’est en tatouant et t’entrainant que tu t’améliores » explique- t-il.

1ER TATOUAGE

« Le tout premier que j’ai fait sur une personne, c’était sur moi-même. Je m’en souviens comme si c’était hier : quelle angoisse… ça faisait partie de l’examen final de ma formation. Depuis, c’est devenu hyper naturel comme si je dessinais sur n’importe quel support » ajoute-t-il.

STYLES ET TECHNIQUES

Aujourd’hui, on utilise souvent le diminutif «tattoo», dérivé de l’anglais, au lieu de tatouage. On parle aussi de « pièce », voire de grande pièce pour un tattoo conséquent (de grande taille) ou, à l’inverse, d’une petite pièce pour un petit tattoo. On peut tatouer avec une machine ou faire du « tattoo handpoke », littéralement « piquer à la main ». Cette seconde technique n’utilise pas de machine électrique. À l’aide d’un outil aiguisé et pointu (de type aiguille), manipulé à la main. On obtient alors, un point à la fois, le tattoo complet. Pour ce qui est de la première technique, de plus en plus de tatoueurs et tatoueuses utilisent des machines rotatives (plus petites, plus légères, moins bruyantes) plutôt que les machines à bobines (plus anciennes, plus bruyantes, plus puissantes). Il n’y a pas vraiment de meilleure option, elles ont leurs caractéristiques propres. Ça dépendra aussi de la préférence de la personne qui tatoue ou qui se fait tatouer. Au niveau des styles, il existe différents courants : « old school », « new school », tatouages en couleurs, les portraits, les surréalistes,… Laurent n’a pas un style particulier : « J’ai une clientèle qui est susceptible de demander plein de choses différentes donc je m’adapte. Je ne fais juste pas de réalisme ». Il nous a tout de même confié sa petite préférence pour les projets graphiques ou géométriques et il s’oriente de plus en plus vers de l’abstrait et du «free-hand» (« main libre » en anglais), une technique sans dessin au préalable.

ÉTAPES DE CONFECTION D’UN TATTOO

À l’heure où les réseaux sociaux servent de vitrine à un bon nombre d’artistes, le premier contact se fait souvent virtuellement. Laurent par exemple, fonctionne via téléphone (appel ou Whatsapp). Si c’est plus simple pour les deux parties, il propose de passer sur place. Une fois qu’il a tous les éléments, il remet un projet au client. De nouveau, ils en rediscutent ensemble : le projet est validé, modifié ou recommencé totalement si besoin. L’idée est que la personne soit satisfaite à 150%.

« Souvent les gens viennent avec une idée, une photo ou un dessin. Je n’impose rien, je propose. L’idée n’est pas non plus de faire du copier-coller d’internet, certains le font, mais moi ça ne m’intéresse pas. Il m’arrive parfois de contourner le dessin, de proposer quelque chose qui est visuellement tout autre mais qui garde le même message, la même symbolique. J’essaye d’éloigner les clients de ce qu’on trouve un peu partout.»

Une fois le projet approuvé, on en fait ce qu’on appelle un « calque » (feuille thermocopiante) qui se pose sur la peau et fait une reproduction éphémère du tattoo (à ce moment, rien n’est définitif, ça s’efface). Celui-ci permet au client de visualiser le résultat et de valider le dessin. Une fois approuvé, c’est parti pour la session de tatouage ! Le prix et la durée de la séance varient évidemment en fonction du projet. De 20 min (temps de préparation et tatouage compris) jusqu’à plusieurs heures (avec des pauses, rassurez-vous !), ce qui influence forcément sur le prix. Pour ce qui est de la douleur – c’est évidemment subjectif – mais oui ça picote.

LAISSER UNE TRACE DANS LA VIE DE QUELQU’UN

« Tatouer pour moi, c’est une manière de participer à l’accomplissement de quelque chose pour quelqu’un d’autre que moi. D’avoir un « rôle » dans l’envie ou dans le besoin que peut ressentir quelqu’un. Que ce soit quelque chose de complétement accessoire ou pour une démarche plus profonde. Cette idée d’avoir une toute petite influence dans la vie des gens qui viennent me voir. Surtout, qu’en général, c’est pour que les personnes se sentent mieux, il y a ce sentiment « positif » après le tattoo.

ÊTRE UN BON TATOUEUR, N’EST PAS JUSTE BIEN SAVOIR TATOUER

Il faut aussi proposer un accompagnement du début à la fin, même après la séance de tatouage, pour prendre des nouvelles de la cicatrisation. D’où l’importance, qu’en amont, le contact passe bien. « Mon boulot ce n’est pas juste : je dessine, je te tatoue, tu paies et tu t’en vas. Je préfère qu’une personne revienne 10 fois pour des petits projets qu’une fois pour un gros projet. Même si financièrement ça ne changerait pas grand-chose, c’est le côté humain qui me plait dans le tatouage aussi. J’aime bien construire quelque chose sur le long terme. J’essaye de prendre le temps avec les gens, d’être à l’écoute, surtout s’ils ne sont pas en confiance avec le stress de la douleur. »

Outre l’aspect artistique et relationnel, cela comporte aussi des avantages pratiques : pas de déplacement (dans le cas du shop à domicile), horaires flexibles pour lui mais aussi pour sa clientèle,… Ce qui lui permet de s’adapter et combiner vie de famille et métier (passion même !).

UN PHÉNOMÈNE ‘ENCRÉ’

C’est indéniable, le tatouage a pris une place importante dans notre société. Après, on aime, on n’aime pas, c’est un autre débat. Laurent partage sa passion et son travail sur ses réseaux sociaux (toutes les infos dans l’encadré ci-dessous). N’hésitez pas à le contacter pour discuter d’un éventuel projet avec lui, il prendra en compte vos envies tout en y ajoutant son côté créatif pour une expérience définitivement – sans mauvais jeux de mots – unique.


NEEDLES TATTOO - VIRGINAL
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